Notre communication vise à comprendre l'influence des apprentissages et contextes éducatifs de l'EPS sur la (trans)formation des dispositions scolaires de lycéen.nes migrant.es, issu.es d'une Unité Pédagogique pour Elèves Allophones Arrivants. En mobilisant une sociologie des socialisations dans une perspective dispositionnaliste (Lahire, 2013; Darmon, 2006), l'étude analyse comment l'EPS travaille, notamment « par corps », le patrimoine dispositionnel des élèves migrant.es, entendu comme un ensemble plus ou moins dynamique, pluriel et hétérogène de façons d'être, d'agir, de voir le monde, incorporé lors de différentes expériences socialisatrices. Il s'agira de comprendre comment se plie, se déplie mais aussi varie ce patrimoine dans l'enchevêtrement des socialisations des élèves dans leur pays d'émigration et celles « en train de se faire », en contexte scolaire, dans la société d'accueil.
Ce travail mobilise une partie des données récoltées dans une enquête déployée plus largement dans trois établissements de niveaux scolaires différents : primaire, collège et lycée. Pour « attraper » la (trans)formation d'un patrimoine dispositionnel (Darmon, 2019), l'étude présentée ici a été menée dans un lycée général, à partir d'une démarche ethnographique, capitalisant 300 heures d'observation, 2 entretiens (biographique puis semi-directif) réalisés auprès de 14 élèves migrant.es (n=28) et 1 entretien semi-directif avec leurs enseignant.es d'EPS et d'UPE2A (n=4).
À une échelle inter-individuelle, les premiers résultats rendent compte d'une progressive mais inégale accommodation des enquêté.es aux objectifs éducatifs du système scolaire français, notamment en EPS, selon leur sexe mais aussi leurs origines sociales et migratoires. À titre d'exemple, concernant la formation à l'autonomie dans le travail scolaire – entendue comme la capacité à prendre des initiatives, à faire des choix dans la réalisation d'un projet personnel, etc. – nous constatons que les élèves ayant eu une socialisation scolaire antérieure incorporent plus facilement des manières d'être et de faire, favorables à l'autonomie contrairement à celles et ceux témoignant d'une scolarité dentelée et discontinue. Concernant l'acquisition d'une disposition à la compétition, les élèves notamment masculins et sportifs, ont tendance à activer des façons d'être et de faire – telles que se dépasser, avoir la meilleure note, rechercher la victoire, etc. – permettant une accommodation plus aisée aux situations pédagogiques contrairement aux élèves, plutôt féminines et/ou plus à distance des normes sportives de l'EPS.
En suivant, une tentative innovante de modélisation schématique de portraits sociologiques d'élèves migrant.es permettra de montrer comment, au niveau intra-individuel, les enquêté.es incorporent, expriment et (trans)forment différemment ces dispositions, au regard de leurs socialisations antérieures et des contextes d'enseignement en EPS.