« C'est quand même une profession qui est nouvelle ».[1] La préparation mentale et la psychologie du sport sont régulièrement présentées comme des « innovations » dans l'espace du sport de haute performance, que ce soit par les professionnels qui se réclament de ces « savoirs » ou plus généralement par les acteurs du « monde » sportif. Les recherches menées en sciences sociales permettent pour autant de rompre avec l'idée selon laquelle la nouveauté est vraiment nouvelle en montrant que ce qui apparaît comme une « innovation » s'inscrit finalement « dans une perspective historique, une tradition culturelle, une logique sociale » (Bensa & Fassin, 2002). En se positionnant en rupture avec les discours qui consistent à faire de la psychologie du sport et de la préparation mentale de « nouveaux » outils de la performance, cette recherche vise à retracer historiquement les conditions sociales d'entrée des pratiques et des experts issus de ces deux champs d'expertise dans la sphère du sport d'élite. Par le biais de l'analyse d'un fonds d'archives provenant de divers organismes sportifs et publics (institut national du sport, de l'expertise et de la performance, archives nationales, comité national olympique du sport français, bibliothèque nationale de France, ...), il conviendra de montrer que la préparation mentale et la psychologie du sport résultent en réalité d'une transformation d'un marché professionnel, dont il s'agira ici d'esquisser la genèse. Du masseur confident au préparateur mental ou psychologue du sport, nous nous intéressons particulièrement à l'évolution du groupe professionnel que constituent les experts du « mental ». Finalement, sans prétendre vouloir reconstruire l'histoire de la psychologie dans l'espace social du sport d'élite, cette communication s'attachera à discuter la question de sa « nouveauté », en cherchant à comprendre la genèse de son marché professionnel, et en interrogeant plus généralement cet espace de croyances et de représentations, qui à défaut d'être unifié, est ancien et représentatif d'une lente constitution des savoirs.