Depuis le début des années 2000, les organisations sportives se préoccupent des enjeux écologiques, au travers d'une double dynamique d'institutionnalisation (création de formations, de colloques, de dispositifs d'action, etc.) et de professionnalisation (avec l'augmentation croissante de porteurs de la cause écologique, occupant des postes de responsable ou chargé de mission développement durable - DD). Cette dynamique d'écologisation s'accompagne d'un ensemble de discours, portés par des dirigeants et porteurs de la cause écologique, faisant de la production de chartes, de démarches et labels « éco-responsables » une « innovation » à laquelle s'associerait une véritable « prise de conscience » et une « démarche volontaire ». Or, il semblerait que ces discours, teintés de désintéressement et de bonne volonté, masquent les contraintes structurelles et les attentes de profits symboliques qui motivent les organisations sportives à se soucier des enjeux écologiques. Antonin, ancien responsable de la mission sport et développement durable du ministère des Sports, explique au cours d'un entretien réalisé dans le cadre de ma thèse que « [l'écologie] c'est un virage, comme le virage numérique. (...) Donc, qu'on soit pour ou contre le numérique, louper ce virage, c'est louper un virage stratégique. Sur l'écologie, c'est pareil. » Ainsi, les organisations sportives qui décident de jouer le jeu écologique parviennent toujours à y identifier « une profitabilité supérieure à leur [les pratiques vertueuses] non prise en compte (Bosvieux-Onyekwelu et Boussard, 2022, p. 8). » Une fédération sportive qui n'aurait pas encore de commission DD, ou de salarié en charge de la RSO est une organisation qui a pris du retard dans la lutte concurrentielle des signes distinctifs, dont fait partie cette course au verdissement (cela indépendamment de la possible sincérité des entrepreneurs qui portent la cause écologique dans leur organisation). En ce sens, et il s'agit-là du problème soulevé par cette communication, la recherche de l'innovation écologique dans les organisations sportives semble correspondre à une « recherche de la distinction » qui pousse les dirigeants sportifs à « anticiper le cours de ce qui se passe » (Bourdieu, 2022, p. 48). Dès lors, ne s'agit-il pas là du rôle principal attribué aux porteurs de la cause écologique, chargés de produire cette innovation écologique ? Les matériaux présentés sont issus d'une quarantaine d'entretiens semi-directifs avec des « porteurs » de l'écologisation, auxquels s'ajoutent des déclarations recueillies dans la presse spécialisée, et dans des comptes-rendus de réunions ou des brochures de présentation.