Le vieillissement a entrainé, au cours des vingt dernières années, un ensemble de mesures (lois, plans, programmes, etc.) visant à répondre aux enjeux de ce phénomène démographique inédit. La promotion des activités physiques et sportives est identifiée comme levier de lutte contre les effets délétères liés au vieillissement. Seulement, leur accessibilité est enreillée dès que l'on s'intéresse aux conditions sociales d'existance, à la socialisation et aux générations. Ces inégalités d'accès révèlent le caractère normatif de cette action publique et nécessite de s'intéresser à leur opérationnalisation.
Pour ce faire, nous avons porté notre attention sur le territoire du Pas-de-Calais, département présentant des formes de vulnérabilités diverses. Accompagnés d'un acteur local, le comité département de l'Ufolep, nous avons questionné le pouvoir discrétionnaire (Lipsky, 1980) des éducateurs sportifs. Cette boîte à outils permet aux agents de terrain d'accompagner, de conseiller, de contrôler et de valoriser les pratiquants lors des séances d'activités physiques adaptées. Ces acteurs, exercant au plus proche du public vieillissant, réussissent à capter et à intégrer les individus ciblés par les entreprises gouvernementales.
Nous avons élaboré une méthodologie s'inscrivant dans une dynamique ethnographique, constituée de phases d'observation de séances, d'entretiens informationnels et d'entretiens ethnographiques. Ces différentes étapes nous ont permi de mettre en exergue le pouvoir discrétionnaire des agents de terrain, leur capacité à créer de la proximité et de la distance avec les pratiquants et leur aptitude à créer de l'intéraction, du contact avec et entre les bénéficiaires. Un savoir être et un savoir faire qui facilitent la mise en activité mais qui s'accompagnent aussi de l'engagement d'autres intermédiaires comme les communes, les associations locales, les groupes de pairs, etc.
Ces éléments permettent d'apporter quelques pistes d'explications initiales pour justifier la réussite de ces dispositifs. Elles s'accompagnent également de la volonté des pratiquants à préserver une vie sociale, dans des parcours de vie balafrés comportant de nombreuses "déprises" (Caradec, 2008). Plusieurs niveaux apparaissent pour expliquer l'entrée et le maintien des publics âgés, majoritairement éloignés de la pratique sportive, dans de tels dispositifs à un âge avancé.
L'opérationnalisation des politiques sport-santé présente une adaptabilité continue, celle des éducateurs exerçant sur le terrain, mais aussi celle des acteurs territoriaux pour absorber et décliner l'action publique. Elle est conditionnée par un ensemble de ressources locales permettant la réussite des dispositifs engagés sur le territoire. Toutefois celle-ci garde une certaine fragilité, induite par l'ensemble des manoeuvres, adaptations, stratégies conduites durant cette phase.