Quand la vulnérabilité est verbalisée. Le cas des joueuses françaises de tennis.
Marine Fontaine  1@  
1 : Université d'Artois
Laboratoire Textes et Cultures

La pratique sportive au plus haut niveau suppose un mode de vie entièrement orienté vers la production de performance malgré le caractère incertain et précaire du métier (Fleuriel & Schotté, 2008). Au tennis, des chiffres interpellant viennent illustrer ce propos : en 2014, d'après une enquête de la Fédération Internationale de Tennis, le seuil de rentabilité se situe à la 336ème place mondial chez les hommes et à la 253ème chez les femmes, c'est-à-dire qu'au-delà de ce classement, les sportifs « perdent de l'argent ». Alors même qu'ils consacrent l'essentiel de leur temps à la production de performance et de manière exclusive, ces athlètes ne possèdent pas le statut de travailleurs et sont alors exposés à être vulnérables. Une vulnérabilité qui s'avère être plus précoce pour les femmes que pour les hommes, puisqu'alors que le tennis figure parmi l'un des seuls sports mixtes dès le début de l'histoire des sports (Terret, 2007), de nettes disparités persistent dans la gratification des sportives, au niveau des sponsors et de la médiatisation (Louveau, 2012). Dès lors, dans quelles mesures l'organisation du tennis de haut niveau et des chemins d'accès au haut niveau alimente une vulnérabilité des joueuses et/ou d'une majorité notable d'entre elles ? 

Une enquête qualitative par récits de vie a été menée auprès de 29 joueuses de haut niveau afin de de saisir la dimension dynamique et subjective des carrières en les situant dans leur interaction avec d'autres champs – qu'ils soient sportifs et/ou extra sportifs – et qui favorisent (ou limitent) la progression dans les étapes de la carrière. Nos résultats montrent que la carrière des tenniswomen est marquée par un long processus de professionnalisation. Une phase d'entrée dans la carrière pendant laquelle les joueuses sont soumises à une socialisation sportive précoce et un engagement progressif vers une pratique compétitive. S'ensuit une phase de développement marquée par une intensification de la pratique sous-tendue par un processus de « conversion » qui implique l'inculcation de la vocation sportive. Enfin, la dernière phase est marquée par un processus de rationalisation et de complexification de l'engagement. Lors de ces différentes phases, nous montrerons, lors de cette communication, que les différents processus de vulnérabilité (financière, sociale, physique, psychologique, etc.) rencontrés par les joueuses se modifient au fil du temps et en fonction des situations rencontrées mais aussi en fonction des dispositions acquises lors du processus de socialisation qui seront activées ou inhibées (Lahire, 1998).


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