Dispositifs scolaires « santé, bien-être et pratiques corporelles » dans le 2nd degré : innovation ou respiration pédagogique des enseignants?
Céline Hergault  1, *@  , Pia Henaff-Pineau  1, *@  , Dominique Charrier  1, *@  
1 : Complexité, Innovation, Activités Motrices et Sportives
Université Paris-Saclay
* : Auteur correspondant

 

Enjeux primordiaux du système éducatif, le bien-être et la santé des élèves sont des facteurs importants de leur réussite éducative. Ils constituent un axe majeur des politiques éducatives, s'inscrivant dans les programmes mais aussi dans des dispositifs à l'échelle d'un établissement scolaire. Ce sont les dispositifs et projets d'initiative locale de quatre collèges (trois à publics plutôt favorisés, un en REP) de l'académie de Versailles, portant sur « santé, bien-être et pratiques corporelles » que nous étudions en tant que compléments ou « alternatives ponctuelles au fonctionnement ordinaire de l'école » (Barrère, 2013).

A partir de seize entretiens semi-directifs menés avec différents personnels éducatifs impliqués (enseignants, personnels de direction, personnels médico-socio-éducatifs), nous analyserons les conditions d'implantation et les facteurs d'évolution de ces dispositifs, « laboratoires où l'on expérimente » (Glasman, 2017). Les innovations, au sens « d'introduction d'un nouveau relatif à un contexte, dans un changement volontaire, intentionnel et délibéré, sous-tendu par des valeurs » (Cros & Broussal, 2020), ainsi que les effets attendus et perçus variables selon les positions et statuts des acteurs, seront interrogés à travers l'analyse des choix explicites ou implicites d'opérationnalisation (objectifs, pratiques corporelles, contenus, formats pédagogiques). S'agit-il de « réinventer l'institution scolaire » (Glasman, 2017), compléter l'offre scolaire traditionnelle, répondre à des difficultés scolaires temporaires, à des publics identifiés, redonner un souffle tant aux élèves qu'aux enseignants ? Quelles sont les pratiques corporelles retenues puis mises en œuvre, par quels enseignants ?  

Nous montrerons notamment que, du dispositif inscrit dans le projet d'établissement à l'action « flash » mise en place au gré des situations contextuelles, les enseignants - le plus souvent des femmes, de plus de dix années d'ancienneté, et pas exclusivement professeurs d'EPS - et les intervenants qu'ils sollicitent, s'appuient sur des pratiques de bien-être marginales dans le système scolaire, telles que yoga, relaxation, méditation, respiration en pleine conscience, auxquelles ils se sont personnellement convertis. Souvent ancrées dans des « success stories » personnelles, ces activités physiques sont justifiées par un mode de vie réaménagé pour soi et à réaménager pour les élèves, les acteurs faisant alors de leurs propres évènements biographiques un argument, quitte à laisser dans le flou (dans l'excès de vitesse ?) le bricolage des contenus. Ces dispositifs, qui visent à améliorer des situations scolaires jugées insatisfaisantes, constitueraient aussi, pour des enseignants déjà expérimentés, une respiration pédagogique répondant à leur besoin de recomposer le « métier d'enseignant » et le « métier d'élève » (Rayou & Tremel, 2021) pour continuer à s'adapter au quotidien. 


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