Dans le sillon des travaux portant sur l'apprentissage des comportements de genre ou de normes sexuées tout au long de la vie (Darmon, 2006), cette proposition se centre sur la construction du genre dans les organismes de formation au Brevet Professionnel de la Jeunesse, de l'Éducation Populaire et des Sports (BPJEPS) Éducateur Sportif beaucoup moins renseignés par la littérature scientifique que pour les formations professionnelles (Lamamra, 2014), les organisations sportives (Chimot, 2005) ou encore les formations universitaires en STAPS (Drivet, 2021).
Articulant une sociologie des rapports sociaux de sexe, de la socialisation et des formations professionnelles, nous analysons, dans le cadre d'une thèse en cours, la formation BPJEPS Éducateur Sportif comme un espace symbolique et pratique de socialisation (Darmon, 2006) dans laquelle s'élaborent des dispositions renforçant ou modulant l'ordre de genre (Connell et al., 2014).
L'objectif de cette communication est d'expliciter le contexte de socialisation genrée de la formation BPJEPS. Nous montrerons précisément comment il conjugue le virilisme du sport avec l'idéologie égalitariste qui domine les univers professionnels de l'éducation.
L'enquête est réalisée auprès d'organismes de formation de BPJEPS Éducateur Sportif à partir d'une cinquantaine d'heures d'observations participantes – sans grille - de cours théoriques et pratiques.
D'après nos résultats, cet espace de formation composé majoritairement d'hommes (65% des diplômé·es (Lochet & Neveu, 2022) et 60 % au moins des formateur·rices (Simian, 2021)) montre une répartition sexuée des contenus de formation : aux formateurs les matières scientifiques - et plus particulièrement les sciences expérimentales - ainsi que les dimensions techniques associées aux activités physiques et sportives (APS) ; aux formatrices les matières transversales comme les projets professionnels ou les APS dites féminines comme l'aquagym.
Cette « valence différentielle des sexes » (Héritier, 1981 ; Fine, 2003), s'exprimant lors de la répartition des cours, structure ainsi une formation qui semble basée sur une différence sexuée incompréssible entre les individus qui conduit à hiérarchiser non seulement des contenus de formation mais aussi les formateurs et les formatrices entre eux.
Alors même que l'on trouve des contenus innovants dans cette formation comme la gestion des conflits ou des réflexions très actuelles sur l'apprentissage, pourquoi le genre est-il traité de façon si caricaturale ? Quels sont les processus sociaux à l'œuvre qui empêchent l'innovation ? Le capital scolaire des responsables pédagogiques, leur mode de recrutement, la place donnée aux savoirs professionnels vs les savoirs savants/universitaires sont des pistes à explorer.