Controverse autour de l'inclusion des athlètes trans au sport de compétition : de la question trans à l'enjeu de la bicatégorisation sexuée
Lucie Pallesi  1@  
1 : Complexité, Innovation, Activités Motrices et Sportives
Université d'Orléans, Université Paris-Saclay, Université d'Orléans, Université Paris-Saclay

Cette communication s'appuie sur ma thèse en cours sur la participation des personnes trans au sport de compétition. L'inclusion des personnes trans, des femmes trans surtout, dans le sport de compétition est un sujet brûlant d'actualité au cœur de multiples controverses (sportive, scientifique, juridique, éthique, sociale, etc.). Depuis une dizaine d'années, on assiste à une prolifération de règlements émanant de fédérations et d'institutions sportives internationales (CIO, World Athletics, World Rugby, FINA, etc.) qui restreignent la participation des femmes trans (plus rarement des hommes trans) aux compétitions internationales. Les femmes trans sont en effet soupçonnées de détenir un avantage physique par rapport aux femmes cis, elles menaceraient l'équité des compétitions voire la sécurité de leurs adversaires. Récemment, un discours fondé sur les droits humains et la non-discrimination est venu accentuer les oppositions.

L'approche par les études trans et la sociologie féministe des sciences et des controverses, épistémologies minoritaires en sociologie du genre et du sport, s'avère particulièrement féconde pour appréhender ce sujet car elle permet de sortir du prisme dominant d'analyse des transidentités en sport par la seule question de l'avantage physique pour éclairer les ressorts de la controverse qui conduisent à privilégier cet angle biomédical. Cette présentation repose sur des sources mixtes. D'une part, les productions institutionnelles (règlements, lignes directrices, documents juridiques, comptes-rendus de réunions, etc.) des institutions sportives internationales (CIO, AMA, fédérations internationales, en particulier les plus proactives sur le sujet : World Athletics, FINA, UCI, World Rugby) disponibles publiquement, depuis 2003 (une trentaine de documents). D'autre part, des entretiens semi-directifs d'une durée moyenne de 2h avec quatre membres des groupes de travail en charge de l'élaboration des règlements et cinq athlètes de haut niveau trans, réalisés entre le printemps 2021 et le printemps 2023. Enfin, un corpus de littérature en sciences biomédicales élaboré à partir des références scientifiques mentionnées dans les règlements et lignes directrices des fédérations (292 références). Dans un premier temps, cette présentation mettra en lumière les obstacles méthodologiques rencontrés dans l'accès au terrain, s'inscrivant dans la tradition de l'épistémologie féministe du positionnement et les analyses de l'injustice épistémique. Dans un second temps, elle analysera la controverse au sein des institutions sportives internationales afin d'une part de révéler les fondements socio-historiques de la représentation biomédicale hégémonique de la transidentité qu'elles relaient, et d'autre part de montrer en quoi cette controverse participe d'une (re)définition des catégories de sexe dans le sport. 


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