Comment ne pas mettre en œuvre une politique publique ? Sociologie du non-engagement des référents sport-santé
Flavien Bouttet  1, *@  
1 : Faculté des Sciences du Sport [Nancy]
Université de Lorraine
* : Auteur correspondant

Depuis 2010, le ministère des Sports demande à ses services déconcentrés départementaux de nommer des référents sport-santé pour mettre en œuvre les politiques nationales et régionales sport-santé-bien-être. Le choix de l'agent devant investir la mission est décidé collectivement au sein des services. Personne n'est désigné contre son gré. Néanmoins, des agents acceptant de devenir référent ne s'engagent finalement pas sur le secteur du sport-santé et ne cherchent pas à mettre en œuvre la politique sur leur territoire. Comment expliquer ce cas de non-engagement dans une nouvelle politique publique (Prochasson, 1998) ? 

 

Pour répondre, la communication propose d'analyser deux cas de non-engagement de référents sport-santé, tous deux professeurs de sport avec le statut de conseiller d'animation sportive au sein de deux services départementaux à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (SDJES). Un entretien d'environ deux heures avec chacun des deux référents a été mené. S'ils constituent le matériau premier de l'analyse, ces entretiens sont mis en contexte grâce à une enquête plus vaste portant sur les politiques d'activité physique à des fins de santé au sein des deux régions dans lesquelles exercent les agents. Dans ce cadre, des entretiens ont été réalisés avec d'autres agents de services déconcentrés du ministère des Sports, des chargés de mission des agences régionales de santé, ou encore avec des acteurs associatifs ou privés marchands engagés dans les activités physiques à des fins de santé. 

 

L'enquête nous permet de proposer plusieurs pistes de travail. La première est organisationnelle. Le ministère et/ou les directions régionales conçoivent des politiques et attribuent de nouvelles missions aux agents. Dans le même temps, les ressources humaines et financières diminuent (Honta, Juhle, 2016). Ainsi, les agents font des choix et délaissent certains secteurs de la politique ministérielle. Dans un second temps, nous verrons que le pouvoir acquis par les agences régionales de santé et la concentration des prises de décision à l'échelle régionale et nationale génèrent un manque d'autonomie et de marge chez les agents des services départementaux qui font alors le choix de se désengager. Enfin, malgré l'intérêt pour la thématique, des agents rejettent la politique ministérielle et les nouvelles normes qui y sont associées. Les dynamiques de médicalisation et de marchandisation marquées respectivement par le développement de la prescription d'activité physique et la valorisation des offres privées marchandes peuvent notamment conduire à une résistance bureaucratique s'illustrant par le non-engagement (Greer, Jarman, 2012).


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