Se conformer aux normes de la biomédecine pour exister. Le cas de l'activité physique adaptée en cancérologie
Matti Suchier  1@  
1 : Université Lumière Lyon II
Centre Max Weber UMR5283

En France, l'activité physique adaptée (Apa) dispose depuis quelques décennies d'un contexte favorable, en premier lieu, une reconnaissance scientifique de ces bénéfices sur la santé y compris au niveau de la prévention, de la guérison et de l'absence de récidive du cancer. De plus, il existe une obligation légale pour les services de la proposer aux patient·es dans le cadre des « soins de support » depuis 2005. Malgré ce contexte, l'Apa reste investie de manière très hétérogène en cancérologie. Issus d'horizons épistémologiques différents (Sciences et techniques des activités physiques et du sport, sciences de l'éducation, psychomotricité), les savoirs et les pratiques des professionnel·les de l'Apa peinent à être reconnues par les professionnel·les de santé.

En articulant une sociologie de l'action publique et une sociologie de la socialisation, cette communication vise à montrer comment, la biomédicalisation des pratiques et des discours représente une condition nécessaire à la légitimité et à l'existence même de l'Apa dans un haut-lieu de la biomédecine que représente la cancérologie.

Cette dernière fait figure de discipline médicale pionnière de la biomédecine, pourtant, dans les années 1980, elle va commencer à développer des soins non-directement curatifs : les soins de support. Ceux-ci demeurent marginalisés et souvent laissés aux professions dominées dans la hiérarchie médicale. Paradoxalement, si l'Apa est isolée au sein de l'hôpital, elle est entièrement dépendante de la prescription des médecins. Pour parvenir à se faire connaître et à légitimer son existence auprès des professionnel·les de santé, les acteur·rices de l'Apa plébiscitent un discours et une approche biomédicale.

Finalement, la nécessité de se conformer aux savoirs et aux pratiques de la biomédecine, contraint la forme que prend l'Apa en cancérologie et limite sa diffusion à l'ensemble de la population (re)produisant par là des inégalités sociales de santé.

Cette communication s'appuie sur un travail de thèse en cours portant sur la mise en mouvement des patient·es en cancérologie. Nous avons conduit des observations non-participantes (60h) au sein d'un Centre de lutte contre le cancer, dans la salle dédiée à l'Apa en présence des patient·es et des professionnel·les ainsi que dans les chambres des patient·es en hématologie. Nous avons également réalisé des entretiens (n=20) auprès d'acteur·rices locaux de l'Apa, de professionnel·les de santé, d'entreprises partenaires d'expérimentations, de patient·es et d'une association promotrice de l'Apa en cancérologie.


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